Par Catherine Verne – Lagrandeparade.fr/ Un rideau de fer quand il se lève, fait un bruit d’enfer. Celui-là ne devrait pas manquer à l’appel. Cela crisse et résiste parfois, rageusement, péniblement à l’ouverture. Et qu’ouvre-t-on ici d’ailleurs de ce mouvement décisif? Des témoignages, des documents personnels, des fragments biographiques de la vraie vie en Europe de l’Est du milieu des années 1940 au milieu des années 1950.
C’est Anne Applebaum qui est à l’origine de ce geste historique. Non qu’on n’ait jamais écrit avant la journaliste du Washington Post à propos de ce qui se passait sous le haut stalinisme, mais cette fois le regard part de l’intérieur: des terres de sang soviétisées, de l’Est lui-même, et donne la parole à ses habitants. Une lumière crue se fait ainsi sur la façon dont Allemands, Hongrois ou Polonais ont traversé les années 1944-1956 de soviétisation. On voit des personnes de chair et de coeur assister aux fêtes de la culture propagandiste, des jeunes embrigadés, des citoyens persécutés par des mesures ethniques ou des lois contraignant le commerce privé. La documentation très riche ici montre comment les peuples de L’Est ont affronté la réalité historique, sans passer par “le prisme de la Guerre Froide” selon le mot de l’auteur pour ne pas dire un tout petit bout de la lorgnette. Belle réflexion aussi, étayée de références culturelles, sur ce que c’est qu’être totalitaire, comment on le devient, et pourquoi le spectacle totalitaire a fini par voir le rideau tomber dans un fracas retentissant.
Rideau de fer
Auteur: Anne Applebaum
Editeur: Folio
Traducteur: Pierre-Emmanuel Dauzat
Parution: 14 janvier 2016
Prix: 12,90 euros
